dimanche 9h30:

pas un bruit dans le "catafjord"; tout le monde dort.

Il fait grand soleil et jolie brise, avec cependant un peu de brume....à l'intérieur du crâne ;

Nous avons fait la fête avec des équipages de rencontre jusqu'à une heure avancée de la nuit.

Las Palmas de Gran Canaria est une grande ville pas très charmante (sauf un vieux quartier ancien ), mais elle a quelquechose de particulier: c'est un genre de "passage obligé", et le point de départ de nombreuses traversées de l'Atlantique par les alizés;

certains font le trajet d'une seule traite, cependant que d'autres flânent aux îles du Cap Vert.

nous, on aime bien faire "pas comme les autres", et nous irons d'abord en Afrique... si les dieux sont avec nous bien sûr

Las Palmas, c'est aussi un très grand port;

avec des quais de commerce pleins de containers, des terminaux pour les paquebots, des remorqueurs et toutes sortes de navires, y compris une grande marina capable d'accueillir des yachts majestueux ( jusqu'à une quarantaine de mètres ), et une rade abritée où nous sommes mouillés en ce moment.

Nous avons retrouvé ici plusieurs bateaux rencontrés au cours du voyage, et les amitiés s'affirment.

Ainsi, Mark et sa fille Anna ont organisé hier soir un petit souper entre amis à bord de leur sloop de 12 mètres:

pas moins de 15 personnes se sont tassées dans leur cockpit devisant fort et chantant à tue-tête....

Il y avait là 2 retraités québecois célibataires accompagnés de leur jeunes équipiers embarqués en vue de la prochaine traversée, un couple de méditérranéens constructeurs amateurs comme les canadiens, un allemand et son équipier français naviguant sur un cata de 8m50 léger comme une plume, et nous cinq;

très rapidement, Marcel le québecois au look "assurancetourix" a sorti sa guitare, et "en avant la musique"

avec les 3 seuls accords qu'il connait, il nous a attaqué "petit papa noël", passant en mode "jazz" au 2ème couplet, puis a enchainé avec "oh when the saints...", puis "minuit chrétien", "le sombrero" ( de Marcel Hamon ), des chansons de Moustaki, Piaf et autres chanteurs contemporains mais pas trop....

Enzo n'en perdait pas une miette jusqu'à ce qu'une de ces casse-burne de mère-de-bébé-qui-voudrait-dormir ne vienne nous biser l'ambiance avec ses jérémiades;

gentils, nous avons tous émigrés 10 mètres plus loin dans le carré du bateau de Marcel, et c'est reparti, avec, en plus, un marseillais qu'avait apporté son accordéon....

tout à coup, il y avait là un saxo alto, alors forcémment, je suis été obligé de souffler dedans....

les amis, sympas, ont dit "merci, que c'est beau!"

c'est bon les amis, et tellement indulgents surtout quand ils sont un peu pétés...

bref, c'était encore un beau moment de voyage.

On remet ça ce soir, à bord du Catafjord cette fois...

j'aime bien la devise de Marcel;

c'est:

"aujourd'hui, on fait RIEN (faut dire le "rien" très fort), pis on commence pas avant midi"

18h: le "Queen Elizabeth II" sort du port;

quelle majesté! ( le bateau, bien sûr )

19h30:

deuxième soirée de teuf consécutive;

y a un peu de mou dans les haubans....

ambiance moins chaude qu'hier;

Anna et son père sont absents, mais Laurent ( de "la Mandragore") s'est joint à nous, et ça soulage notre barde Marcel, car Laurent gratte bien la guitare;

ça y est, mon sax est "exhumé" de dessous la couchette; va falloir que je m'y remette...

vers 1h30, on bâche; on est des raisonnables isn't it?

Lundi:

réveil laborieux vers 10h;

j'aperçois, par mon hublot, une petite annexe qui semble bien venir vers nous;

ça se confirme: c'est notre ami Pierre rencontré à Agadir, qui vient partager notre p'tit déj;

c'est une superbonne surprise, car nous espérions beaucoup le revoir avant le Cap Vert.

Pierre a travaillé de nombreuses années pour l'Unicef; c'est un passionné de l'Afrique et un conteur intarissable;

le p'tit déj se mue bientôt en apéro/midi ( mais léger; on est des raisonnables quand même..)

Pour nous, l'escale de Las Palmas est définitivement conviviale;

nous l'avions expérimentée il y a 25 ans lors d'un convoyage vers les Antilles; c'est toujours aussi plaisant.

Mardi:

nous sommes invités à déjeuner à bord de "passepartoo", sloop en acier de 12 mètres, équipé par nos amis Bettina et Serge, de vrais aventuriers:

nombreuses navigations en mer rouge et dans l'océan indien, recherche de trésors ( Serge est plongeur pro depuis 40 ans; un précurseur), Betty a traversé le Brésil seule en stop etc..etc.... on les écouterait pendant des heures tellement ils ont vécu de choses peu ordinaires;

pendant que nous évoquons ces moments de vie, "maltese falcon" entre au port:

c'est un fantastique bateau de 75 mètres que nous admirons beaucoup;

il est grée de 3 mats à phares carrés ultramodernes: les mats et vergues sont en fibre de carbone et l'ensemble est entièrement automatisé et piloté par ordinateur;

magique!

Ironie, il est à quai à coté d'un 3 mats-barque en tôles rivetées d'environ 100 ans son ainé, et on peut voir leurs gréements respectifs superposés;

ça me fait penser aux photos de famille qu'on fait en collant la mémé au milieu dans son fauteuil roulant, avec tous les petits trouducs de la famille agglutinés devant....

Grosse frayeur en allant à terre au cybercafé: nos amis canadiens du "el pepe blues", que nous avons salué ce midi avec force "ce n'est qu'un au revoir...", sont là , à quai, victimes d'une avarie qui les a contraints à rebrousser chemin après seulement quelques heures de route.

Nous sommes inquiets:

que leur est-il arrivés?

ils ont sûrement brisé quelquechose d'essentiel à la bonne marche du navire pour revenir aussi vite.

Nous allons aux renseignements au "sailor's bar", le QG des globe-flotteurs;

effectivement, il y eu avarie, et pas des moindres:

Marcel a pété son dentier en bouffant un caouète!!!!!

c'est dingue ça! surtout pour un gars comme lui qui s'entraine sans relâche question caouètes, nous pouvons en témoigner.

Mais quand le mauvais sort s'acharne, que faire?

Si tout va bien, ils repartent demain....

mercredi:

le vent est trop faible,

demain peut-être.....

faut beaucoup d'humilité dans une vie de marins;

on est tributaire des éléments