nous sommes en pays Diola;

Ehidj est un hameau d'une centaine d'habitants situé dans l'ouest de la Casamance, sur une ile, au fond d'un bolon (bras de rivière);

ici on vit un peu comme au moyen âge:

pas d'éléctricité, pas d'assainissement, pas d'eau courante, pas de rue même...

les cases sont disséminées au hasard sur un espace sablonneux dans le nord de l'ile; la plupart sont en parpaing, mais certaines sont "à l'ancienne" : en bois et terre.

Un puits permet de s'approvisionner en eau, mais il faut puiser à la main...

Autour des cases, chacun élève ses poules et ses cochons;

les tout petits enfants restent au village avec leurs mères, cependant que les plus grands vont à l'école à plusieurs kilomètres et ne rentrent chez leurs parents qu'aux vacances, vivant chez un oncle ou un grand frère durant les périodes scolaires.

Ehidj est une ile sacrée; on n'y enterre pas les morts.

Quand un décès survient, le mort est emporté en pirogue dans l'ile voisine qui, elle, est apte à les recevoir.

Les 9 cases du village sont habitées par la famille "Sumare"; tous les hommes sont frères ou cousins et vivent en grande harmonie;

l'homme le plus agé, Alphonse, est le chef du village.

Hier, nous avons quitté Ziguinchor et sa relative modernité pour venir vivre quelques jours au coeur de l'Afrique, loin de tout.

Nous avons mouillé Catafjord dans un recoin du bolon, entouré de mangrove, juste en face du village;

trois autres bateaux sont mouillés là: des habitués.

La journée s'est passée en commençant par bosser un peu sur le bateau pour rayer des lignes de la liste...., puis, après un bon repas avec l'équipage dans le cockpit, sous les tauds de soleil, nous avons ramassé des coques sur le banc de sable juste à coté du bateau.

Je me suis baigné pour la première fois depuis notre départ!

j'en ai profité pour nettoyer les safrans en plongée, et faire barboter Enzo pour l'habituer à l'eau.

En fin d'après-midi, nous avons pu apprécier la gentillesse et la spontanéité des indigènes lors d'une visite au village.

Nous nous sommes retrouvés à une quinzaine de personnes autour d'une grande table au bar de Léon:

il y avait là ses frères, ses copains et les habitants de 2 autres bateaux.

mardi 9 heures:

Enzo vient de partir à l'école, en annexe, avec ses parents;

c'est la première fois.

L'instit c'est "Médar", un grand rasta qui réunit chaque matin les tout petits du village sous un cocotier, à proximité du bar à Léon.

Un tableau noir, quelques bancs de bois, le ouistiti fait le singe au bout de sa laisse, et Médar éduque les merdeux:

c'est la maternelle!

Pour sa première expérience scolaire, notre petit toubab (surnom donné aux blancs) est bien dissipé, et ses parents le rapatrient rapidement...

à midi, déjeuner au bar à Léon avec un excellent cochon grillé;

nos nouveaux amis, Antoine, Paul, Médar, Léon Ciquindo sont invités à visiter le Catafjord;

les liens d'amitiés se tissent rapidement;

Antoine propose une promenade en brousse demain;

départ à 9h30; visite des cases et commentaires sur la vie sociale à Ehidj.

Quelle quiétude!

Ils ont très peu d'argent, mais mangent tous à leur faim, et partagent systématiquement le peu qu'ils ont.

Avant le départ en brousse, nous buvons le vin de palme avec la famille.

explications: le "cueilleur" grimpe au palmier à l'aide d'une ceinture en lianes tréssées, puis incise l'arbre avant de disposer un entonnoir fabriqué à partir d'une feuille, et de suspendre la bouteille plastique qui s'emplit toute seule du précieux nectar....

quelques heures plus tard, le liquide blanchâtre et sucré a rempli le récipient et commence à fermenter;

c'est pas compliqué,,,, faut juste grimper au palmier.

Pour les noix de coco, c'est plus facile:

on les ramasse quand elles sont tombées, quelques coups de machette habiles pour enlever la bourre et fendre la noix , et miam miam...

La famille Toumaré nous a résérvé un magnifique surprise:

ce soir, Alphonse, le doyen a décidé de nous inviter à une fête organisée en notre honneur avec la participation de tout le village.

Rendez-vous en fin d'après-midi pour aider à préparer la fête.

Rien ne pouvait nous faire plus plaisir!

Malou et moi passons l'après-midi à aider les "jardinières";

le "jardin des femmes" produit des légumes;

le travail y est très pénible;

nous avons envie de mieux comprendre et d'aider.

Les femmes africaines sont admirables; elles ont la vie dure;

le travail consiste à arracher les mauvaises herbes (à la main), et puiser de l'eau pour arroser:

c'est épuisant!

des blancs qui les aident au jardin, elles n'ont jamais vu ça!

Chez Léon, nous avons fait la connaissance de 2 américaines délicieuses: Edie Hartshorne et Vijali Hamilton, 2 grandes artistes.

Ces dames d'une soixantaine d'années parcourent le monde façon "routard", avec peu d'argent (alors qu'elles ont été fort riches...), dorment dans la pirogue, et mènent un combat pour l'amélioration de la vie des femmes et la mise en place de solutions accessibles et durables pour l'eau douce;

plusieurs scientifiques affirment que l'eau sera l'enjeu pour l'humanité dans seulement quelques décennies.

Elles m'ont demandé de leur dessiner un "bouilleur" pour déssaller l'eau de mer, et sont reparties satisfaites avec le gribouillage infâme que je leur ai fait en 10 minutes...

Antoine et Paul sont partis avec Claire et Tintin couper des racines dans la mangrove pour la fête de ce soir....

je vous sent inquiets:

"ils ne vont tout de même pas bouffer des racines!"

une minute je vous prie:

le truc, c'est que les racines de palétuviers sont couvertes d'huitres sauvages;

ça vous la coupe ça!

Un grand feu de bois sur la plage, les racines et les huitres dans le feu de bois, et c'est un festin de centaines d'huitres cuites qui nous fera l'apéro:

pas con les sénégalais!

Après le délicieux cochon grillé, les djembés sont de sortie et font vibrer hommes et femmes dans des contorsions spectaculaires.

Vers minuit, il est temps de faire les adieux car le départ est prévu au petit jour à 7 heures, à cause de la marée et de ses courants;

la Casamance, c'est un pays merveilleux qui mériterait d'y consacrer des mois voire des années...

Mais, pour le moment, c'est le voyage, et l'envie de "voir plus loin" qui l'emporte.

jeudi 10 heures:

nous remontons le flot vers Ziguinchor;

le soleil commence à bien chauffer; je vais tomber la chemise;

nous sommes partis depuis 7 heures ce matin;

les moteurs ronronnent doucement, quelques dauphins nous accompagnent;

la vie s'écoule tranquillement ( sauf mon ordinateur qui "déconne" et ça m'éxaspère...mais bon)

j'ai oublié de vous parler du traitement des ordures ménagères à Ziguinchor:

en pleine ville, vous avez des placettes d'environ 20 mètres par 20, avec un petit écriteau "défense de déposer des ordures", et juste derrière cet écriteau tout le monde vient déposer ses immondices;

comme ça en pleine ville!

une nuée de vautours et quelques cochons de tailles diverses ( tout une famille sûrement) vivent là, et sont en charge du retraitement de ces déchets ménagers ;

voyez comme c'est simple!

on se demande pourquoi faire compliqué

par contre, pour l'odeur, y aurait à redire;

ce vendredi est le jour des préparatifs de départ;

demain nous quittons le Sénégal pour voguer vers les iles du cap vert:

faire tamponner les passeports, acquérir quelques vivres et de l'eau, terminer les travaux d'étanchéité en cours;

au revoir attachant Sénégal