attablés devant une petite mousse à même la plage, servis par une souriante demoiselle, nous contemplons nos canotes qui titirent gentimment sur leurs "pattes d'oie" (les "pattes d'oie", ce sont des bouts' qui relient la chaine d'ancre aux 2 étraves des catas pour les stabiliser au mouillage). Nous sommes à Gamboa sur l'ile de Tinharé, accompagnés par les "Pénélope". Nous avons quitté Itaparica ensemble hier matin dès 7 h pour parcourir tranquillement les 42 milles menant ici. Navigation bien peinarde: peu de vent et de la houle; moteurs tout le temps, avec, à la fin de la journée, la récompense: mouillage dans un endroit superbe. Gamboa est un village assez touristique quasimment inaccessible par la terre; il n'y a pas de rue bitumée, ni de bagnole, ni de 2 roues; juste quelques tracteurs et des piétons; les liaisons se font essentiellement par bateaux, avec des canotes en bois d'une douzaine de mètres, plus quelques vedettes et semi-rigides surmotorisés pour les excités, (grands pollueurs de surcroit);

grande plage de sable blanc, cocotiers, petites maisons basses, quelques gargottes à cervoise tiède avec tables en plastiques et parasols, c'est le spectacle qui nous est donné ce matin au réveil.....sous un soleil déjà haut à 8h; ça favorise la bonne humeur à s'installer....

Les "Pénélopes" sont accompagnés d'un couple d'amis d'agréable compagnie qui sont avec eux pour 3 semaines de vacances;

Jean-louis a eu le privilège de se faire activement draguer par une belle brésilienne qui l'avait pris pour un mec de la téloche (Darry Cowl ou Tom Cruise, je ne me rappelle pas bien....); en tout cas , ça nous a fait le sujet de conversation pendant une bonne partie de l'apéro;

à propos d'apéro d'ailleurs, je ne sais pas ce que vous en penserez, mais personnellement, je trouve que nous avons adopté une organisation assez fine avec les "pénélopes": un coup c'est chez nous, un coup c'est chez eux, un coup c'est chacun chez soi! vachement rusé non?

bref, aujourd'hui vendredi, c'est excursion à Morro de Sao Paulo; le départ est un peu hésitant, le temps qu'on se mette tous d'accord sur des points, de détail, certes, mais qui ont leur importance.....comme par exemple, est-ce qu'on met du carburant dans le moteur de l'annexe avant de partir ou pas ? bon ben, les Pénélopes ont choisi la réponse négative eux....pourquoi pas? ça se passe d'abord à l'aviron, mais pour étaler le courant, faudrait s'entrainer un peu.....puis en remorque pour finir......aprés encore une petite demi-heure de palabres pour décider qui c'est que comment quoi qu'on fait-il maintenant, et l'eau!, on a oublié l'eau!, on n'a qu'à en acheter, comment que ça se dit en portugais....bref, vers 12h30, la caravane se met en route pedestrement le long de la plage en pensant immédiatement "ça sera sympa quand on s'arrêtera pour syphonner une mousse et manger"....Pourtant, la ballade est très plaisante; alternant les zones de sable et les rochers; quelques pêcheurs "cueillent" les rares bestioles qui ont daigné se jetter dans leurs filets deguenillés.....un peu plus loin, une source naturelle "fabrique" une boue rouge que les indigènes ont paré de toutes sortes de vertus; ils s'y ébattent joyeusement, qui pour maigrir (mais y'a du boulot des fois!), qui pour rajeunir, qui pour être en bonne santé..... ils vont ensuite faire sécher leurs gangues au soleil, avant de se débarrasser des croûtes....je me demande si ça ne fait pas un peu "épilation" en même temps....

Nous arrivons au phare de la pointe de Morro. Une petite guérite abrite un préposé qui "rançonne" les passants (2,5 euros par personne) d'une taxe spéciale pour visiter la St Tropez des Bahiannais; ainsi surnomment-ils Morro de Sao Paulo.

Et, de fait, cette petite cité est empreinte d'une ambiance riante et joviale qui incite bien au farniente: nombreuses boutiques faisant argent de toutes sortes de trucs aussi jolis que futiles; magnifiques plages de sable blanc, avec dessus, des gens peu vétus qui glandouillent au soleil en bouffant des glaces.....

Le retour à bord s'effectue en bateau pays: une barque d'une douzaine de mètres, mue par un tricylindre diesel souffreteux, et chargée d'une soixantaine de bipèdes; la nuit tombe pendant le voyage, dans une ambiance un peu irréelle; c'est typique, sobre, beau.

Un petit plaisir simple toujours aussi jubilatoire, c'est de déguster un poisson grillé pas cher, assis à une terrasse en contemplant benoîtement notre modeste canote qui joue au tir à la corde avec son mouillage: c'est exactement ce que nous avons fait hier Dimanche et encore aujourd'hui , vous l'aurez deviné: lundi!

Hier c'était à Galeo, village de pêcheurs bien peu touristique, et aujourd'hui c'est à Cairu. La promenade digestive qui s'ensuit a pour cadre le couvent/église qui est en cours de rénovation (et c'est pas un luxe.....); le père franciscain d'une grande gentillesse nous en commente la visite; c'est pas banal. Cet endroit renferme, entre autres trésors, une statue de saint Dominique d'une troublante beauté et qui ressemble étonnemment à l'original.....

Les "pénélopes" nous ont quitté cet après-midi......et nous en éprouvons une tristesse vachement triste, car c'était vraiment, je sais pas comment vous dire....

Mon ami Daniel subissait depuis plusieurs jours les affres d'une fuite à son embase de moteur tribord: environ 50 litres d'eau salée s'engouffrait quotidiennement dans son compartiment moteur par cette saloperie de fuite, dont, malgré plusieurs heures de supputations passionnées, nous n'avions pas identifié l'origine. Eh bien c'est maintenant chose faite! Dans un ultime effort cérébral, juste avant les effusions d'avant qu'on se quitte, j'ai trouvé l'éspication,,,,,,,mais je vais pas vous la dire, d'abord parce que la plupart d'entre vous s'en tamponnent le coccyx à mac2, et puis ça alourdirait inutilement ce récit qui ne fait déjà pas que dans la légèreté; en tout cas, ça fuit toujours, mais je trouve que c'est moins désagréable quand on sait pourquoi que quand on sait pas; et là, ben maintenant, on sait ( le moins désagréable, honnêtement, en terme de fuites, c'est tout de même quand c'est sur les bateaux des autres.....que je dis ); pis ça m'a fait plaisir de passer un peu de temps avec mon copain pour résoudre ses petits problèmes de plomberie; je dis ça, car avant la fuite, ils avaient aussi une pompe de cale en panne.....et ça, nous l'avons dépanné avec brio et avec un fer à souder; contacts sertis oxydés par l'eau de mer: un grand classique!

mercredi 30

navigation à la campagne aujourd'hui; entre les iles de Tinharé et de Cairù, en allant sur Boipeba, les canaux sont étroits, et les berges si verdoyantes, que, dans certains passages, le paysage est plus vert que bleu! la navigation mobilise toute notre attention, car cette zone n'est pas hydrographiée; pour nous guider, nous disposons de waypoints fournis par un guide touristique brésilien; leur suivi, allié à une attention soutenue aux indications des sondeurs nous permet d'arriver à Canaveiras sans s'échouer. Mais le "pied de pilote" est descendu à 10 centimètres par moment ( les crabes ont dû avoir un peu la trouille....); maintenant, c'est fait, et ça valait bien le déplacement. Canaveiras est un petit village de pêcheurs blotti dans le carrefour maritime formé par 3 iles et le continent; quelques cumulus générés par la végétation luxuriante enserrent l'horizon tout autour du canote dans un écrin de coton......c'est calme, serein , simplement ravissant.....

Ce village nous rappelle un peu ceux de Casamance: maisons disseminées au hasard sans rue ni place, ni véhicules d'aucune sorte; le sol est de terre sablonneuse, avec beaucoup d'arbres et de végétations diverses dont les toujours admirables bougainvillés; quelques petits singes gros comme des écureuils se propulsent avec grâce de branche en branche en nous observant du coin de l'oeil. Plusieurs maisons sont construites "à l'ancienne": murs constitués de branches maintenues entre elles par des fibres de cocotiers, avec les interstices colmatés par une mixture de terre argileuse et d'huile de poissons. Le conglomérat qui en résulte est plus dur que la pierre; nous avons pu le constater dans une église en ruine où la pierre s'est érodée avec le temps , et pas la mixture.....alors ? ça vous la coupe ça! malheureusement, y a des saloperies de bestioles qui prolifèrent dans le bois et collent des maladies graveleuses aux gens qui vivent dans ces habitations.....

de retour à l'appontement, mon attention est attirée par un raffinnement ( j'ai mis 2 "n" exprès parce que je trouvais vachement raffiné) qui me touche dans cet environnement minimaliste: quelques pêcheurs ont érigé un abri en feuille de palmiers sous lequel ils "garent" à flot leurs pirogues de bois pour les préserver des ardeurs du soleil: ça m'enchante! j'aime qu'on soigne son bateau, aussi modeste soit-il.

OK, je reconnais, il m'est arrivé d'employer le mot "excursion" pour qualifier d'ordinaires balades dont le but n'était que d'aller quérir le pain, voire simplement faire disparaitre par magie une cervoise fraiche; mais aujourd'hui, ç'est différent, ça mérite réellement;

nous avons décidé de nous rendre à Morere sur l'ile de Boipeba pour rendre visite à nos amis Mirtès et Sete; je vous les situe: brésiliens, la bonne trentaine, nous les avons rencontré à Salvador cependant qu'ils croisaient à bord de leur voilier de 7 mètres en contreplaqué ( une copie brésilienne du Serpentaire ), puis nous les avons retrouvés à Ribeira; nous avions fait une bonne petite teuf ensemble avec les "orange bleue"; nous avions alors promis de leur rendre visite dans leur pousada de Morere, lieu de villégiature pour le moins difficile d'accès.....

départ prévu vers 9h30 à marée basse: il pleut des cordes et la visibilité est minable! nous sommes sur le point de remettre à demain quand survient la superbe éclaircie qui nous pousse à partir; première étape: franchir avec le dinghy, à basse mer, le petit bras de 4,5 milles qui nous sépare de Porto de Boipeba; ça s'appelle "rio de inferno"! c'est vous dire si c'est engageant....et justement, c'est pas plus commode comme passage!.....malgré les seulement 35 centimètres de tirant d'eau de notre embase Yamaha, nous nous échouons dès les premières minutes dans 20 cm d'eau bien opaque; on voit à peine le fond; pour deviner où sont les veines de courant, nous scrutons la forme des bords découverts: s'ils descendent en pente douce: pas d'eau; si, au contraire, leur pente est un peu plus abrupte, le chenal est à coté; je mets vite au point une petite technique de sondage en navigation par piqué d'aviron avec la main gauche, la droite tenant fermement la poignée du moteur; ça marche, mais pas suffisamment pour éviter de racler le fond à plusieurs reprises; le chenal est tortueux (et pourtant, pas la queue d'une tortue à l'horizon....allez comprendre des fois.....), et traverse parfois le lit du rio d'une berge à l'autre perpendiculairement à l'axe du milieu passant obligatoirement par le centre, si vous voyez le genre.....l'observation des rares locaux qui s'aventurent ici nous fournit également des indications intéressantes. Ainsi, nous progressons avec une lenteur ébouriffante vers notre but; déjà qu'on était parti un peu tard, c'est pas gagné! tout à coup soudainement, la chance rapplique sous la forme d'une vedette de 5 mètres environ propulsée par un hors-bord de 115 cv; il fonce, connaissant parfaitement le chemin, lui; je lui emboite aussitôt l'hélice pour suivre son sillage le plus longtemps possible; il fait parfois des virages sur la tranche à 90° perché sur ses redans.... impressionnant! et là, deuxième coup de bol: le gars a remarqué qu'on le suivait et il ralentit son allure pour s'ajuster à notre vitesse maxi ( environ 22 noeuds tout de même ); ainsi; en un bon quart d'heure, c'est bâché, nous sommes à Porto de Boipeba; notre "étoile du berger" est un jeune brésilien bien sympa : Danielo . Après une petite discussion, il nous gardera l'annexe pendant que nous continuons à pied vers notre destination;

Il n'y a, en effet, aucun moyen de locomotion mécanique pour se rendre à Morere distante d'environ 5 km....

C'est parti! il n'y a que des chemins de sable, étroits et marécageux, et notre progression est lente et incertaine; après environ une demi-heure de marche, nous atteignons une belle et grande plage, déserte, à l'exception de quelques surfeurs dévalant leurs colline d'écume (les pauvres types....), et un jeune gars qui piétonne le long de la grève; question: comment fait-on pour aller à Morere depuis ici? réponse: à marée basse, on marche le long de la plage.....facile....sauf que là, c'est marée pas basse, et, donc, il y a de l'eau jusqu'au menton pour moi, et un peu plus pour Malou!....et sinon, par la route? demi-tour (houpsss) puis contourner tout le pays par l'arrière: environ 1 heure de marche! bon, on s'y colle..... au bout d'environ 20 minutes, nous demandons confirmation que nous sommes dans la bonne direction à l'unique personne rencontrée depuis; c'est bon, qu'y dit! super, et c'est encore loin? environ une heure de marche qu'y redit!.... bon ben on va pas se décourager hein biloute.....effectivement, le gars a raison, il faut bien ça, et même un peu plus, car vers la fin, en plus, ça monte pour franchir la dune qui sépare Morere du reste de l'ile. Enfin, nous arrivons, après plus de 2 heures de marche! il est 14 h , et les amis sont absents.....palabres avec le petit personnel de la pousada, et, pour finir, une jeune femme accepte de nous guider vers le restau où ils sont allés nourrir leurs 6 clients français......il est 14h30, nous sommes fatigués et affamés, mais l'accueil des amis efface tout en quelques secondes dans les embrassades et effusions; ils ont fini de déjeuner; leurs restes feront parfaitement notre affaire.....et déjà c'est 15h30; il est grand temps d'attaquer le retour pour retrouver Catafjord avant la nuit; il existe tout de même un moyen moins fatiguant que la marche pour rallier Porto de Boipeba: c'est la remorque aménagée, tirée par un tracteur agricole. On ne peut pas dire que ce soit confortable, mais, comparé à l'aller, c'est "first class" !

Nous retrouvons notre dinghy, mais Danielo est absent; il a confié la surveillance à quelques copains et tout s'est bien passé;

le retour se fait "la poignée dans le coin" ( plus besoin de suivre le chenal, c'est pleine mer et il y a de l'eau partout); par contre, un vilain grain ne nous lâche pas de toute la route, et nous arrivons vers 17h15 trempés juqu'au zoo ( je n'a jamais compris cette expression ) malgré les coupe-vents; qu'il est doux de retrouver la quiétude et le confort de notre modeste barcasse!

allez Malou, exceptionnellement: apéro!

Notre escale à Canaveiras s'est achevée hier et restera dans nos mémoires; les rencontres ont été nombreuses et fortes. D'abord Fred le missionnaire, son épouse Claudie et leurs 2 enfants; ils mènent avec enthousiasme et dévouement leur mission évangélique d'assistance aux pêcheurs; ils disposent pour celà d'un petit navire hopital, catamaran d'une quinzaine de mètres, qui va de village en village pour soigner les gens démunis et leur donner des médicaments; tout ça en prêchant la bonne parole.... Nous avons déjeuné ensemble, avec les autres missionnaires dans leur église, et c'était un moment formidable.

Et puis, Tania et Cintia nous ont fait l'amitié de nous accueillir dans leur maison, sur une toute petite ile, en face de Canaveiras, dans un hameau de 5 maisons. Délicate attention, Tania nous a d'emblée demandé si l'originalité de leur couple ne nous dérangeait pas! Elle est la patronne d'un bar flottant, fait de bidons en plastiques assemblés par des planches de bois, le tout surmonté d'un modeste toit de feuilles de palmiers; ici, on mange des huitres que nos 2 copines "cultivent" elles-mêmes à 1/2 mille de là. Les gens de cette petite communauté vivent dans l'harmonie, malgré leur dénuement (ou peut-être grace à lui.....), et ça fait qu'on se sent bien dans cet endroit.

Debout à 6 h du mat' à cause de la marée! les 6 milles qui nous séparent du mouillage de Galeao sont digérés avant 8 h. Mise à l'eau de l'annexe direction Valença, ville de 75000 habitants qui nous plonge immédiatement dans les décibels et l'agitation de la vie citadine, après la tranquillité de ces derniers jours. La grande mode, ici, pour les jeunes propriétaires de bagnoles qui peuvent se le permettre, c'est d'équiper leurs véhicules avec des sonos de folie: leur coffre arrière est bourré de haut-parleurs de toutes tailles, excités par des amplis de 1200 watts!!!!! de véritables sonos de concert! avec ça, les gars se baladent dans les rues, à petite vitesse, hayon arrière béant, pour faire profiter le peuple de leurs concerts ambulants...... Nous partageons la journée entre les tâches indispensables/chiantes, genre prendre des sous au distributeur, et s'en servir pour acheter à bouffer ( et du vin....), et, balade dans la ville à la découverte des curiosités locales, plus un petit passage au cyber pour communiquer un peu; nous déjeunons pour 6 euros dans un bon restau "a kilo"; ça se présente comme une cafeteria: on prend une assiette, et on la remplit avec tous les trucs qu'on veut, qui sont étalés là devant nous; ensuite, au moment de passer à la caisse, le préposé pèse l'assiette, et ça génère un ticket avec le prix; c'est au kilo. Tout est au même prix! celui qui bouffe beaucoup paye plus cher que celui qui grignotte; chacun prend ainsi ce qu'il peut avaler (ou se payer, ça dépend des gens), et , à la fin, il n'y a pas beaucoup de restes.....

mardi 5 août:

de retour à Itaparica à grande vitesse avec 15 nds de vent de travers, nous retrouvons plusieurs copains , et c'est soirée barbecue chez Sylvain qui habite ici;

sinon, on ne m'hôtera pas de l'idée qu'ici, y z'ont encore bien du boulot avant de figurer honorablement au championnat du monde de curling sur gravier.....